RIBERA Jusepe de, Le Pied-bot, 1642

Jusepe de RIBERA, Le Pied-bot, 1642, huile sur toile, 164 × 93,5 cm, Paris, musée du Louvre
Jusepe de RIBERA (Œuvre dans le domaine publique) © Rémi de Valenciennes, photographies recadrées y compris les détails, sous licence CC BY-NC 2.0)
« Le Pied bot représente un jeune garçon qui nous regarde en souriant. Il marche seul dans la campagne, portant fièrement une béquille sur l’épaule comme un soldat porterait sa lance. Cet enfant est infirme, son pied droit est déformé. Il peut s’agir d’une anomalie congénitale (pied bot) ou des conséquences d’une hémiplégie. La petitesse de ses jambes nous indique qu’il est sans doute nain. D’autre part, il est pieds nus, mal vêtu et porte une large besace. Dans sa main gauche, il tient une feuille de papier sur laquelle est écrit en latin : « Donnez-moi l’aumône pour l’amour de Dieu ». Ce permis de mendier était nécessaire à Naples au XVIIe siècle, époque à laquelle le peintre espagnol Jose de Ribera réalise ce portrait. »
https://panoramadelart.com/analyse/le-pied-bot
« Inscription en capitales sur le papier tenu par l’enfant : DA MIHI ELIMO/SINAM PROPTER [ AM: caché par son pouce] OREM DEI (soit : Donne-moi l’aumône pour l’amour de Dieu). »
https://collections.louvre.fr/ark:/53355/cl010059547
‘Le Pied bot est un tableau caravagesque par son sujet réaliste. Un être misérable et infirme est montré en gros plan, sans idéalisation. Mais sa silhouette se détache sur un fond lumineux, le paysage est peint dans des tons clairs. On retrouve ici la palette du peintre et l’association des ocres et du bleu. Après 1635, Ribera abandonne le ténébrisme de ses débuts et emprunte aux Vénitiens leurs valeurs colorées et lumineuses. Son évolution vers un art plus classique est due aussi à la présence à Naples de peintres bolonais élèves des Carrache : Guido Reni, Lanfranco, le Dominiquin. »
https://panoramadelart.com/analyse/le-pied-bot
« Ribera peint les ascètes et les martyrs aux mains noueuses et aux corps décharnés, mais aussi les nains, les bouffons, les femmes à barbe. La réalité qu’il décrit rappelle celle des romans picaresques. La littérature espagnole des XVIe et XVIIe siècles privilégie les aventures des gueux (les picaros), des antihéros à la morale douteuse. Ces marginaux, opposés aux hidalgos, les privilégiés, constituent le revers de la médaille de l’Espagne du Siècle d’or, la plus grande puissance mondiale de l’époque. On peut évoquer dans le même esprit les portraits de nains de Vélasquez et Le Jeune mendiant de Murillo. »
https://panoramadelart.com/analyse/le-pied-bot
« Le Pied bot image principale est un sujet profane mais peint dans un contexte historique particulier, celui de la Contre-Réforme. Le monde chrétien a connu au XVIe siècle une crise religieuse avec l’apparition de la Réforme protestante. Dans les pays catholiques, l’art est utilisé dans un but militant : il doit non seulement plaire, mais inspirer de nobles pensées et ramener le spectateur vers les vertus chrétiennes de pauvreté, d’humilité et de charité. Le jeune mendiant de Ribera fait appel à notre compassion, mais il est souriant et fier. L’horizon bas confère de la monumentalité à son portrait en pied. Le ciel bleu à l’arrière-plan ajoute une note d’optimisme. En donnant de la dignité à un être handicapé, Ribera nous rappelle que nous sommes tous égaux devant Dieu car nous sommes tous ses enfants. Les pauvres et les déshérités, plus encore, sont les élus de Dieu. C’est un privilège et un devoir de les secourir. »